Début mai 2016, je regardai avec horreur notre salle de bain et décidai de la rafraîchir. Une salle de bain avec une vieille chaudière à gaz fatiguée, l’affreux tuyau PVC d’évacuation des WC de l’étage contre le mur, des carrelages différents et moches aux murs, un meuble bancal et pour couronner le tout un plafond en lambris.
La chaudière nous oblige à une aération de 20 cm de diamètre vers l’extérieur, et en Alsace, ça caille l’hiver. Imaginez prendre une douche le matin, dans une pièce à 10°C, (convecteur à fond). Non n’imaginez pas c’est mieux.
Un jour de colère j’arrachai le papier peint miteux, bien décidé à refaire cette pièce sordide. Quelques jours plus tard, j’étais hospitalisé et arrêté pour cinq mois avec défense de faire le moindre effort. La salle de bain aussi.
Après cette longue parenthèse nous nous lançâmes dans les devis pour poser une chaudière à ventouse dans une autre pièce, un WC suspendu et une douche italienne. La douche impliquait de casser une cloison, poser du carrelage et pour faire propre, il fallait refaire les murs. Coût global du chantier 20 000 €, heu comment dire ? Je m’achète 4 Nikon D5 avec ça…
Il faillait revoir le projet à la baisse. Sortir la chaudière de la pièce impliquait de passer des tuyaux, donc de casser le plafond en lambris, donc de casser la cloison intelligemment fixée sur le lambris, donc casser la douche collée à la cloison donc 20 000 €. Nous tournions en rond.
La chaudière resterait dans la salle de bain. Mais si elle restait, le trou de 20 cm également et les 10°C matinaux aussi. Nous tournions en rond.
Un chauffagiste nous proposa la chaudière à ventouse qui se branche sur la cheminée avec un double tubage, cher mais plus besoin de déplacer la chaudière. Nous avancions. Il sortit dehors regarder la cheminée et nous annonça qu’aucun ouvrier n’accepterait de faire le tubage de la cheminée. Nous revenions au point de départ.
Ma femme commença à devenir folle. Une salle de bain horrible, un époux pas encore en état de se lancer dans de gros travaux, et une salle de bain abominable. Chaque jour elle me harcelait : « Et cette salle de bain alors ? Tu te décides ? ».
A sa demande, un nouveau chauffagiste vint faire un devis de chaudière à ventouse reliée à la cheminée, cette fois sans réserve sur la hauteur. Mais j’hésitais. Comment passer le câblage de la sonde sans une goulotte ou casser le plafond qui casserait la cloison qui casserait la douche, comment cacher la chaudière, objet moche par excellence, comment poser le WC suspendu et cacher le tuyau PVC gris, comment comment ? Si seulement j’avais pu casser ce maudit plafond, mais vérification après vérification, il était maintenant certain que le machin en lambris portait la cloison.
Mon épouse fit le forcing, rappelant le chauffagiste pour nous aider à trouver des solutions (ou me forcer la main). La sonde, il la passera dans le plafond sans le casser, la chaudière peut être cachée derrière des portes de placard, il sort dehors pour regarder une nouvelle fois la cheminée, « Elle est haute quand même, impossible de venir avec nacelle, ça va être compliqué », j’ai cru que ma femme allait le tuer. Mais non, le mec se dit prêt a faire le chantier avant décembre alors nous signons.
Dans quelques jours, le chauffagiste va installer la nouvelle chaudière. S’il ne se tue pas en tombant la cheminée (20 m de hauteur quand même), si celle-ci ne s’écroule pas sur le toit, s’il n’explose pas le plafond et donc la cloison et donc la douche, je serai face au mur, obligé de commencer les travaux de la salle de bain. Poser un WC suspendu, l’entourer de placo pour cacher le tuyaux en PVC gris, poser deux portes coulissantes pour masquer la chaudière, poser du placo sur le plafond pour cacher ce lambris si moche, poser un sol plastique genre ardoises pour cacher le carrelage vraiment trop moche.
Pourquoi ai-je signé ? 6000 €… Nous aurions pu rester encore quelques années heureux avec notre salle de bain sans papier peint, son joli tuyaux PVC gris, son carrelage dépareillé, son délicieux plafond en lambris, son trou de 20 cm qui souffle de l’air glacé et l’éclairage LED qui vous aveugle le matin. Ou alors, signer le chèque de 20 000 € et regarder les mecs bosser en critiquant chaque détail.
A la place, je suis dans le hall d’entrée, là où aurait du prendre place la chaudière à ventouse, de l’autre côté de la cloison qu’il aurait fallu détruire, le chantier à 20 000 €. Oui parce que maintenant que cette partie là de la maison ne sera plus impactée par la salle de bain, ma femme trouve que ce serait bien de la rafraîchir cette pièce. Décollage de papier peint, lissage, peinture, je déteste le bricolage, je déteste les vacances, mais j’aime ma femme…