Mickey 7

Image

Mickey Barnes est un consommable. Un humain répliqué que l’on peut sacrifier pour réaliser des missions dangereuses. 

S’il meurt, il suffit de lancer la production d’une nouvelle copie et Mickey pourra partir à nouveau pour réparer le réacteur à antimatière, tester l’atmosphère d’une planète ou combattre les vers des glaces.

Mickey a choisi son métier pour avoir une place dans le premier vaisseau de colonisation en partance. C’était ça où souffrir dans d’atroces douleurs suite à un pari stupide.

Mais voilà, un jour, alors que tout le monde croit Mickey 7 mort lors de sa dernière mission, il revient vivant à la base et dans son lit se trouve Mickey 8, fraîchement sorti de cuve. Et là tout devient nettement plus compliqué.

Ce n’est pas le film Mickey 17 qui a motivé ma lecture – je ne l’ai pas vu au cinéma – mais le résumé au dos du livre. Le thème abordé semblait prometteur. 

Toutefois le roman n’a pas été vraiment à la hauteur de mes espérances. La vie des Mickey n’est pas follement originale même si l’auteur traite tout cela avec une bonne dose d’humour. 

Par contre Mickey se passionne pour l’histoire et les récits sur la colonisation spatiale, qu’il dévore entre ses missions suicidaires, construisent peu à peu l’univers d’une civilisation qui a choisi l’expansion galactique pour résoudre ses problèmes et assurer sa survie.

Ces chroniques de vaisseaux ruches partant vers l’inconnu sont clairement la partie la plus intéressante du roman et l’auteur aurait pu en faire le cœur de son livre.

La conclusion du roman est hélas prévisible tant elle est facile mais colle assez bien avec le ton léger du livre. Alors si vous voulez lire un roman de science-fiction qui ne prend pas la tête, Mickey 7 pourrait vous convenir.

Le Guerriers de l’Hiver

Image

Je ne lis presque jamais de roman historique car je ne m’intéresse pas vraiment au sujet. Je ne lis jamais de romans sur la guerre car je déteste la guerre. 

Si Les guerriers de l’hiver est arrivé entre mes mains, c’est parce que mon épouse me l’a offert. Et comme chacun des romans qu’elle m’a offert a été une belle surprise, j’ai lu Les guerriers de l’hiver de Norek. Et j’ai bien fait.

Je n’avais jamais entendu parler de cet épisode de la seconde guerre mondiale, ceci dit, je ne connais pas grand-chose à la seconde guerre mondiale. J’ignorais que l’URSS avait envahi la Finlande et le roman m’a permis de situer ce petit pays nordique sur la mappemonde. Oui, je ne l’intéresse pas non plus à la géographie.

Avant que Hitler n’envahisse la France, Staline est entré en Finlande. L’armée Rouge toute puissante allait écraser en quelques jours la jeune nation finlandaise, enfin ça c’était le plan, un peu comme en Ukraine. Sauf que les finlandais ont résisté. Ils ont perdu mais ont vaillamment résisté plus de cent jours face à un adversaire dix fois plus nombreux.

C’est l’histoire de cette résistance que raconte Olivier Norek, empruntant le héros  de guerre Simo pour en faire son personnage principal. Un fils de fermier habile au fusil devenu rapidement la frayeur de l’armée russe. Un sniper avec un tableau de chasse impressionnant.

Par moins trente voire moins cinquante degrés, armés de skis et de capes blanches, les fermiers finlandais, devenus brutalement des soldats, vêtus de demis uniformes, vont tenir la frontière contre les tanks russes, les bombardiers, les canons et dix fois plus d’hommes venus de toute la grande URSS mais peu motivés à combattre.

Simo, se fondant dans la nature, le soleil dans le dos, de la neige dans la bouche, ses chargeurs contre son corps, immobile pendant des heures, allongé dans la neige, va guetter sa cible, un officier russe, un sniper, une patrouille avancée, luttant contre le froid, avant d’appuyer sur la gâchette et faire mouche à chaque tir.

Outre Simo le sniper d’élite, Les guerriers de l’hivers c’est aussi l’histoire de ses villageois réunis en compagnie, de ses amis liés par la vie et la mort, de cet officier alcoolique trompe la mort surnommé l’Horreur du Maroc, de ses femmes soignant les blessés, transportant les corps, reprisant les vêtements des morts, ces héros anonymes qui se battirent pour sauver leur patrie pourtant condamnée à être écrasée par le rouleau compresseur russe.

Un magnifique roman historique qui ne souffre que d’une erreur, sa petite digression sur la France qui n’apporte absolument rien au récit.

Chasseur de têtes

Image

Il n’est pas aisé de lire un roman dont le héros principal représente tout ce que vous détestez chez une personne.

Roger Brown travaille dans un cabinet de recrutement et excelle dans son métier. Lorsqu’il propose un candidat pour un poste à une entreprise, celle-ci valide toujours son choix. Il fait partie des meilleurs. C’est un winner.

Il a épousé une femme sublime, possède une magnifique demeure et vit très largement au dessus de ses moyens. Il couvre son épouse de bijoux, lui offre une galerie d’art ruineuse, et pour arrondir ses fins de mois, il vole des œuvres d’art à ses clients. En plus, il ne veut pas d’enfants.

Mais un jour, Diana, l’épouse du chasseur de têtes, lui présente Clas Greve, le candidat parfait pour un poste de PDG d’une entreprise de pointe sur la technologie GPS, sans parler du fait qu’il possède dans sa collection d’œuvres d’art un Rubens perdu. Le pigeon parfait.

Sauf que le pigeon se révèle être un rapace et ce qui aurait dû devenir une affaire juteuse pour Roger devient un véritable enfer. Son univers s’effondre brutalement, de chasseur il devient la proie, et sa vie confortable devient une mortelle chasse à l’homme dont il est la cible. 

Commencé comme un insupportable roman à la gloire d’un Golden Boy, l’auteur poursuit avec un thriller passionnant et violent où, brutalement, alors que je le détestais cordialement, le chasseur de têtes, devient un personnage presque sympathique.

Jo Nesbo maîtrise sa narration avec brio, gère magistralement les rebondissements de l’histoire, dose la violence et toute l’horreur du récit et réussit à nous surprendre pendant plus de trois cent pages. 

Je n’ai cependant un regret, qu’il n’aie pas arrêté son livre juste avant l’interview du policier persuadé d’avoir résolu une vaste affaire de vol d’œuvre d’art avec huit meurtres à la clé. Ce dernier rebondissement était à mon avis inutile.

Enfin dans cette édition de poche, il y a un petit détail qui m’a agacé, certains mots contiennent de mystérieuses substitutions de caractères remplacés par des ‘-‘.  Cela ne gêne pas la lecture mais ce n’est pas très agréable.

Reykjavik

Image

Boris Petersen

En 1955, Lara une jeune fille de 15 ans, disparaissait mystérieusement sur l’île de Videy au large de Reykjavik. Trente ans plus tard, Valur un jeune journaliste, rouvre l’enquête sur la disparition de la jeune fille. 

Ainsi débute le polar nordique écrit à deux mains. Un roman qui nous plonge dans la vie de la capitale islandaise en 1986 et dans une enquête policière non résolue. 

Le livre est celui de trois enquêtes, celle du policier qui se chargez de la disparition en 1955, celle du journaliste trente en plus tard et enfin celle de sa sœur Sunna quelques mois après.

L’enquête est presque un prétexte pour nous décrire les années quatre-vingt en Islande, les débuts de l’urbanisation de la capitale et une certaine manière de gérer les affaires à l’époque où Reykjavik était encore une petite ville.

La rupture au milieu du roman m’a prise au dépourvu, j’étais confortablement installé dans le récit du jeune journaliste Valur quand Sunna, sa sœur étudiante en lettres, a pris la relève. C’était presque comme passer à un nouveau livre et il m’a fallu un temps d’adaptation pour reprendre le rythme de la lecture. Mais une fois cette nouvelle narration apprivoisée, j’ai dévoré la fin du roman.

Orbital

Image

Je suis enfin retourné dans l’unique librairie de ma petite ville et au milieu des rayons, un livre m’a immédiatement interpellé, Orbital de Samantha Harvey.

L’autrice n’a jamais voyagé dans l’espace, sinon en rêve et n’écrit pas de romans de science-fiction. Elle enseigne la création littéraire à l’université.

Orbital raconte la vie de six astronautes à bord de la station spatiale internationale, seize chapitres en forme d’orbites autour de la Terre où le lecteur découvre la vie dans l’ISS et où l’auteur imagine ce qui se passe dans la tête des astronautes.

Il s’agit d’un roman contemplatif, poétique et presque philosophique rythmé par trois événements qui vont perturber la routine des astronautes : le décès de la mère de Chie, la passagère japonaise, un typhon qui menace les Philippines et le retour sur la Lune des astronautes américains.

Une fiction dans un futur proche remplie d’incroyables descriptions de notre planète bleue, de réflexions sur l’humanité, de descriptions de la routine à bord de la station spatiale internationale.

Il n’y a pas besoin d’être passionné d’espace comme moi pour se faire happer par ce magnifique roman superbement écrit et traduit. Plus de deux-cent pages pour prendre de la hauteur avec notre monde et découvrir combien il est beau et fragile.

Kirinyaga

Image

(C) SERGEY PESTEREV

Avez-vous déjà lu un livre de science-fiction qui ressemble à une compilation de contes à la manière du dessin animé Kirikou et la Sorcière ?

Kirinyaga est un recueil de nouvelles que l’on compare souvent aux Chroniques Martiennes de Ray Bradbury. Pourtant dans ces histoires courtes, la science-fiction n’est qu’une toile de fond pour raconter une histoire. Ici pas de robots, de technologies, ni de vaisseaux spatiaux, mais une planète où un peuple a décidé de recommencer une nouvelle vie loin de la Terre. Ce peuple, ce sont les paisibles Kikuyu, qui vivaient autrefois au Kenya avant que l’homme blanc ne détruise leur pays et leur culture.

Une poignée de Kikuyu a fuit la Terre pour créer une utopie sur une nouvelle planète, loin de la civilisation européenne.

Les nouvelles, toujours centrées sur le sage de la communauté, racontent des épisodes de cette vie utopique où les humains mettent souvent à mal leur idéal de vie. Des nouvelles écrites un peu à la manière des contes et dans lesquelles le mundumugu (comprenez le sage) raconte des paraboles mettant en scène des animaux et le dieu Kai.

Le sage et fondateur de cette utopie, un certain Koriba, un homme cultivé et fanatique qui a vécu en Europe avant de retourner au Kenya, me rappelle beaucoup le patriarche du roman Ravages de Barjavel pour son intransigeance et son refus de tout retour à la technologie.

A la fin de la série de nouvelles de Kirinyaga prend place Kilimandjaro, un mini roman qui raconte cette fois l’utopie réalisé plus tard par le peuple Massaï. Une tout autre manière de considérer l’utopie africaine, en prenant cette fois beaucoup plus de distance avec le poids de la tradition. Cette suite est un complément indispensable à Kirinyaga, apportant un tout autre regard sur l’utopie.

Est-ce qu’une utopie peut survivre à la nature humaine et aux passage des générations ? Un vaste sujet souvent traité dans la science-fiction comme par exemple dans Les Dépossédés d’Ursula le Guinn. Le livre Kirinyaga apporte quelques réponses mais pose beaucoup plus de questions.

Un fabuleux recueil de nouvelles à lire absolument.

Les sept Divinités du bonheur

Image

Ce livre est le troisième roman de Keigo Higashino que je lis. Un auteur japonais de  policiers traduit chez Acte Sud. Pourquoi ai-je porté mon dévolu sur ce poche plutôt qu’un autre ? A cause du petit carton accroché à la couverture du livre et qui saluait d’une jolie écriture manuscrite cette nouvelle histoire de l’auteur. J’adore lorsque les libraires donnent leur avis sur un bouquin.

Les Sept Divinités du bonheur raconte le meurtre de Aoyagi Takeaki, un homme d’affaires assassiné au couteau dans un passage souterrain à Tokyo. Un coupable présumé est rapidement appréhendé, après s’être fait renverser par un camion. Plongé dans le coma suite à l’accident, celui-ci ne peut hélas livrer sa version des faits.

Mais l’inspecteur Kaga, arpentant inlassablement à pied le quartier qui a été le théâtre du crime, se forge lentement une opinion sur ce fait divers déjà classé par les médias. Le coupable que tout accuse ne serait pas le meurtrier.

J’ai peiné à rentrer dans le roman en partie à cause de la profusion de personnages aux noms difficiles à retenir. J’ai également été déçu par l’apparente froideur du récit. Et puis tout a basculé lorsque j’ai découvert la vie secrète de cet homme d’affaires poignardé, sa famille et celle de l’accusé. L’histoire devient un pèlerinage des sept divinités du bonheur, des visites dans des cafés, restaurants et boutiques du quartier où Aoyagi Takeaki se rendait en secret de sa famille.

Finalement Les Sept Divinités du bonheur est une très belle histoire pleine d’humanité mais je lui préfère Le Nouveau du même auteur et que j’avais lu en premier. Mais manifestement le libraire n’était pas de mon avis.

Central Station

Image

Central Station est un roman de cyber punk religieux israélo palestinien. Oui c’est possible. 

Il s’agit également du second roman Lavie Tidhar que je lis. Le premier, Aucune Terre n’est promise, ne m’avait pas emballé outre mesure. Tout le contraire de Central Station. 

Pourtant tous deux racontent presque la même histoire, celle d’un fils revenu à la maison pour assister à la mort de son père.

Lavie Tidhar décrit un univers futuriste pas forcément alléchant, des portraits de personnages vivants en territoire israélien autour d’un astroport. Il y a des robots, une vampire, un bouquiniste, des bébés éprouvettes devenus des enfants étranges, un martien venu dire au revoir à son père, des dieux et que sais-je encore.

Des êtres dissemblables et pourtant reliés par une histoire qui se construit au fil des chapitres et qui s’achève peu après la mort d’un père.

Le monde de Central Station est exotique, original, complexe, numérique et profondément humain. Un très beau livre.

Je me suis aperçu en préparant cet article qu’Alias en avait également parlé sur son blog. Les grands esprits se rencontrent.

Veiller sur Elle

Image

Le roman de Jean-Baptiste Andrea est une fresque historique des deux grandes guerres, une saga familiale, une histoire d’une pieta et la vie d’un enfant devenu sculpteur. C’est un peu Les Piliers de la Terre racontant le début du vingtième siècle.

Le sculpteur Michelangelo Vitaliani aussi surnommé Mimo, se meurt dans une abbaye, emportant avec lui le secret de son chef oeuvre, une pieta que le vatican cache jalousement tant elle trouble ceux qui l’ont admiré.

Mimo a été pauvre, nain de cirque, dépravé, mondain, sculpteur convoité, jouet d’une grande famille et par dessus tout l’ami de sa muse, l’indomptable Viola Orsini.

L’histoire débute vraiment dans le village de Pietra d’Alba par l’enfance de l’artiste en tant qu’apprenti sculpteur, la rencontre avec la puissante famille Orsini et Viola leur fille rebelle. Elle se poursuit à Florence, Rome mais revient toujours dans ce petit village isolé où la famille Orsini règne presque sans partage. 

Le roman se lit à la première personne comme une fresque historique et familiale italienne où les destins croisés du couple Mimo et Viola nouent et dénouent les intrigues politiques et religieuses de la famille Orsini de 1904 à 1986. 

Une lecture distrayante pour un prix Goncourt même s’il ne s’agit pas d’un chef d’œuvre contrairement à la pieta dont on apprend le secret prévisible dans les dernières pages du roman.

Kallocaïne

Image

Comme l’annonce le résumé du livre, Kallocaïne est le chaînon manquant entre Fahrenheit 451, Le meilleur des mondes et 1984. 

Dans un état totalitaire où les habitants vivent sous surveillance dans la crainte permanente d’une dénonciation, un chimiste zélé et ambitieux met au point un sérum de vérité.

Ce Léo Kall, époux fidèle, père de trois enfants, est un chimiste dévoué à la cause de son gouvernement, un rouage docile et bien huilé qui contribue au bon fonctionnement de sa cité.

Mais alors qu’il expérimente son invention sur des volontaires puis des prisonniers, sa perception de la société se distord en écoutant les sujets soumis à une injection de Kallocaïne livrer leurs pensées les plus secrètes.

Ecrit en 1940, neuf ans avant 1984 par Karin Boye, une suédoise quarantenaire homosexuelle pacifiste et anticapitaliste, le roman s’inspire de ses voyages en Union Soviétique et en Allemagne. Son dernier roman, écrit quelques mois avant son suicide, dépeint une société totalitaire en guerre dans laquelle le camarade soldat n’est que le rouage d’une grande machine où le sacrifice de soi est l’obligation et la liberté une hérésie.

Un classique d’un genre indémodable et intemporel comme 1984 et Le meilleur des mondes, qui eux sont plus connus du public.