Seize heures pour deux photographies

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A l’heure des smartphones il est difficile d’imaginer que l’on puisse passer cinq heures pour réaliser une photographie. Un clic sur l’application, un filtre cosmétique et hop, votre image est en ligne.

En photographie classique, avec un appareil photo numérique hybride ou reflex, cela prend déjà plus de temps si vous réalisez des images en mode natif. Après un bref clic clac Kodak vous devez rentrer à la maison, glisser la carte mémoire dans l’ordinateur et traiter l’image sur un logiciel avant enfin de la publier.

En astro photo c’est encore plus compliqué. Tout d’abord il est nécessaire de se rendre sur un site éloigné de la pollution atmosphérique et lumineuse, pour moi le Champ du Feu à environ une heure de route. Il faut ensuite installer l’instrument sur site, brancher l’ordinateur, fixer l’appareil photo, réaliser l’alignement polaire, disons une petite demi-heure selon le matériel. 

Ensuite commence la session de photographie elle-même. C’est là que je démarre mon chrono.

0 H – 30 secondes de pose répétées 120 fois pour obtenir une heure de pose cumulée.

1H – Une fois les clichés réalisés, il est nécessaire de produire des images de calibration appelées light, bias et dark. Comptez un quart d’heure de plus minimum.

1H15 – Une fois terminé, il faut tout remballer et revenir à la maison vers trois heures du matin. Je ne comptabilise pas le rangement du matériel, la route, le déchargement de la voiture et la poignée d’heures de sommeil réparateur. Ce serait tricher.

1H15 toujours donc – Le lendemain, après quelques heures de sommeil, commence le travail de développement. Il faut d’abord additionner ces cent vingt clichés et les calibrer avec des images de référence, un travail qui prend de une à deux heures mais qui peut être automatisé ce qui laisse le temps de boire quelques cafés indispensables.

2H15 – Suit le traitement sur le logiciel Pixinsight. Celui-ci nécessite toute mon énergie d’autant que je fais mes premiers pas avec cet outil. Délinéarisation de l’image, suppression du gradient, déconvolution, réduction du bruit, linéarisation, histogramme, saturation, suppression du bruit, réduction des étoiles, harmonisation les couches, ce travail dure facilement deux bonnes heures avec de nombreuses tentatives plus ou moins heureuses.

4H30 – Mais ce n’est pas terminé. La touche finale vient avec Lightroom sur lequel je retravaille les couleurs, les détails, le cadrage et le bruit. Cette dernière étape ne dure jamais longtemps car je commence à être assez à l’aise avec l’outil à force de l’utiliser.

5H – Il ne reste plus qu’à poster la photographie sur les réseaux sociaux et attendre les retours.

Mais tant qu’à passer 30 minutes à charger la voiture, une heure sur la route pour aller en montagne, prendre encore 30 minutes pour installer le matériel, 15 pour le remballer, une heure pour rentrer, 30 minutes pour décharger la voiture et encore 15 minutes pour aérer les optiques embuées, soit, si vous comptez bien quatre heures au total sans parler de la partie photo et de l’attente de la nuit astronomique au sommet de la montagne pendant encore deux heures, autant photographier plusieurs objets pour rentabiliser le voyage.

Si l’astro photographie est une passion solitaire, un lent apprentissage de la patience et une plongée dans des technologies complexes, c’est également une belle aventure humaine. Car lorsque vous pointez les étoiles vous n’êtes pas souvent le seul passionné avec votre instrument et de nombreux curieux viennent voir ce que vous observez. 

Les heures passées sous la voute céleste à montrer la lune, expliquer le fonctionnement du matériel et à échanger avec les astronomes amateurs tout en contemplant la Voie Lactée sont magnifiques, enrichissantes et passionnantes. Alors qu’est-ce que seize heures et un petit déficit de sommeil pour de si beaux moments ?