Echoes and Signals – Lunar

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Il est temps de nous réconcilier avec la Russie avant que nous sombrions tous dans l’apocalypse nucléaire.

Sur YouTube je suis tombé sur la vidéo de ‘Serpentine’ du groupe Echoes and Signals que je suivais du temps de Neoprog. Et j’ai été envoûté.

Alors j’ai cherché l’album d’où il est tiré le morceau via les liens présents dans la description du clip. Mais en vain et c’est presque par hasard que je suis tombé sur l’album Lunar de Echoes and Signals sur Bandcamp.

Lunar est un album sorti en 2023 et disponible, à l’heure où je publie cette chronique, gratuitement sur la plateforme de streaming comme tous leurs autres albums, sans même une possibilité de verser une contrepartie aux musiciens.

J’ai écouté Lunar et ma première impression née de ‘Serpentine’ s’est confirmée. Lunar est un magnifique concept album neuf titres de cinquante minutes. Du rock progressif écrit un peu à la manière de Mariusz Duda.

Echoes and Signals est un projet quasi solo mené par Fedor accompagné de Alexy et de Alexander respectivement à la basse et la batterie. Le projet date de 2013 et compte de nombreux albums à découvrir sur Bandcamp par exemple. Le groupe passe sur Lunar d’atmosphères éthérées à des motifs nettement plus musclés comme dans ‘The Witching Hour’ ou ‘Roots’ et s’entiche également d’électronique par moment.

Il y a du Lunatic Soul, du Riverside ou bien du Opeth dans leurs compositions à moins que ce ne soit une tendance générale aux pays de l’est, mais ça j’en doute. Mais Lunar c’est surtout la voix de Fedor qui tisse sa toile autour de vous qui finit par vous ensorceler, particulièrement sur les titres lents comme ‘Lunar’, ‘Serpentine’ ou ‘Cassandra’.

Sur les neuf morceaux, ‘Mana’ est le plus long, dépassant les dix minutes. Une pièce électro synthwave cinématico progressive de très belle facture qui partage l’album en deux parties distinctes.

Car après ce titre, je trouve que Lunar change de direction, optant pour des mélodies plus rythmées comme ‘Cinders’ ou bien ‘Roots’. J’accroche également un peu moins sur le second long format ‘Gravity’ qui débute de manière musclée sans convaincre vraiment et qui heureusement fonctionne nettement mieux dans sa seconde moitié.

‘Cassandra’, le dernier titre de Lunar, revient à ce qui m’avait séduit dans ‘Serpentine’, à savoir les émotions, les claviers et peu de rythmique.

Même si Lunar n’est pas complètement homogène, il installe une atmosphère inquiétante et belle dans notre salon, où la lune, toujours mystérieuse, vient nous visiter le temps d’un album. Difficile de ne pas vous recommander l’album, d’autant que vous pouvez l’écouter sans dépenser un seul copec, pardon, un rouble.

Big Big Train – The Likes Of Us

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Sachant que cette chronique allait être publiée un premier avril, je me suis demandé ce que je pourrais faire pour l’occasion. Il fallait marquer le coup, ça n’arrive pas tous les jours. Alors pour une fois, amis lecteurs, je vous invite à regarder la version Youtube qui se trouve à la fin de cet article. Ce n’est pas grand chose, mais sur le moment ça m’a fait rire (pardon)…

Big Big Train devait négocier un virage très délicat après la disparition de David. Remplacer un chanteur dans un groupe est toujours une affaire complexe, surtout lorsque celui-ci possèdait une telle personnalité.

The Likes Of Us est le premier vrai album du groupe sans David, trois années après le fabuleux Welcome To The Planet.

N’étant pas aussi fan de la voix d’Alberto Bravin, je redoutais l’arrivée de ce nouvel opus et j’ai finalement été agréablement surpris.

The Likes Of Us ce sont neuf morceaux dont un version single edit pour près d’une heure et quart de musique. Alors fatalement il y a quelques longs formats. Deux en fait : ‘Beneath The Masts’ et ses dix sept minutes au compteur ainsi que le plus modeste ‘Miramare’.

Pour cet album Big Big Train à mis le paquet sur la musique, peut-être pour compenser le manque d’émotions dans le chant. Et cette musique renoue avec le prog symphonique des seventies, du moins nettement plus que sur les précédents albums du groupe.

Toutefois, je trouve The Likes Of Us un petit peu longuet et j’aurai pu me contenter du quatuor formé de ‘Light Left In The Day’, ‘Beneath The Masts’, ‘Miramare’ et ‘Love Is The Light’. Et justement, puisque l’on parle de ‘Love Is The Light’, je trouve que c’est le titre de l’album sur lequel Alberto insuffle le plus d’émotion. Bon il faut bien reconnaître que le thème s’y prête beaucoup, mais cela fait du bien de vibrer à l’unisson pour une fois avec le chanteur.

Parce que sur le reste de The Likes Of Us, je fonctionne au diapason de la partition plus que du texte.

Les influences à la Genesis ou bien The Tangent s’entendent principalement sur les deux longs formats mais également sur le troisième titre en durée, ‘Last Eleven’, grâce à la guitare et au Mellotron qui ouvrent le morceau et reviennent à plusieurs reprises comme dans ‘Bookmarks’.  Le violon de Clare Lindley, très présent sur cet album, y sème toutefois le trouble à plusieurs reprises.

Je m’aperçois finalement que je n’ai pas grand chose de plus à vous raconter sur The Likes Of Us. J’ai été séduit par son évidente facture rétro progressive et les pièces à rallonge.

The Likes Of Us reste trop long à mon goût, raison pour laquelle il n’entrera pas dans ma collection de vinyles, mais c’est un très bel album.

Je vais certainement regretter encore longtemps la disparition de David. Toutefois, je trouve que Big Big Train a su poursuivre son chemin malgré le décès de leur chanteur.

Universe Effects – The Distance

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J’ignore qui m’a tuyauté sur le groupe québécois Universe Effects. Mais, qui qu’il soit, je l’en remercie.

Je suivais sans le savoir le quintet de cousins depuis quelques temps déjà sur Bandcamp quand leur nouvel album The Distance est sorti sans prévenir. J’y ai jeté une oreille intriguée et si je vous en parle aujourd’hui, c’est que leur musique m’a clairement tapé dans l’oreille.

Universe Effects existe depuis 2015 mais n’a composé que trois albums en comptant le dernier.

The Distance, ce sont quatre morceaux pour moins d’une demie heure de metal progressif. Une musique qui emprunte au cinématique symphonique, au djent comme au jazz.

Le timbre de Gabriel Antoine Vallée, le chanteur du groupe, est reconnaissable entre tous. Il surprend tout d’abord, d’autant que le chant est très présent sur l’album et finit par prendre aux tripes. Les claviers de Francis Grégoire sont omniprésents et souvent virtuoses comme dans le premier titre ‘Layers’. Mais les guitares aux solis lumineux de Gabriel Cyr ne sont pas en reste loin de là. Quant à la section rythmique tenue par Alexandre Hudon et Dominic Tapin-Brousseau, elle est la colonne vertébrale de ces compositions protéiformes, s’offrant régulièrement quelques mesures de bravoure.

La pochette de The Distance s’apparente à de l’art graphique. Une photographie hyper contrastée de drone prise à la verticale du bord de mer où le blanc de l’écune tranche avec le roux des rochers, séparé par une bande de sable noir. Une thématique déjà exploitée pour leur single ‘Layers’ sorti au mois de février.

Ce titre, qui débute l’album, donne dans le djent  électro cinématique à la manière d’un Tesseract.  Il fait également songer à un Dream Theater avec ses claviers virtuoses.

‘Waves’ débute de manière nettement plus apaisée entre piano et guitare jazzy et explose après trois minutes pour retomber dans la fusion cent-vingt secondes plus tard un peu dans le style de Sanguine Hum.

‘Flow’ est dans la pure veine d’un metal progressif technique et virtuose qui trouve tout de même le temps de se poser sur les couplets plus calmes. Il s’offre également une courte section instrumentale construite sur plusieurs soli de guitare, clavier et de basse.

‘Release’, le long format de neuf minutes qui conclut trop vite cet album, joue avec la forme symphonique. On est pas loin encore une fois d’un Dream Theater avec son emphase mais dans un traitement nettement plus subtil.

Universe Effects est ma première découverte de l’année. Plus je l’écoute, plus je lui découvre de nouvelles qualités. Je vous le recommande donc et de mon côté, je vais explorer leur deux autres albums de ce pas.

anasazi – shine a light

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Vous ai-je déjà dit que playing ordinary people était mon album préféré du groupe anasazi ? Oui sans nul doute. Il est sorti le 11 avril 2011 et, d’après moi, il possède je ne sais quoi de The Incident de Porcupine Tree, qui lui aussi, est mon album favori de la bande à Wilson.

Pour les vingt ans du groupe, Mathieu, l’homme derrière ce projet, a sorti une version symphonique d’un des plus beaux morceaux de cet album, ‘shine a light’, un titre qui me prend à chaque fois aux tripes lorsque je l’écoute.

Je possède l’album playing ordinary people dans deux éditions, le digipack offert par Matthieu lorsqu’il a signé avec un label la réédition du disque ainsi que le boîtier cristal que j’avais commandé avant sa sortie.

Évidemment, lorsque j’ai entendu la version 2024 de ‘shine a light’, je n’ai pu résister à l’envie de vous en parler. Le morceau, initialement long de neuf minutes, gagne ici soixante quinze secondes, une orchestration symphonique, un solo de guitare signé Tristan Klein. Hélas il a perdu son contrepoint final avec la voix de Delphine Polet.

Ce qui était à l’origine un titre relativement épuré où la voix granuleuse de Mathieu prenait presque tout l’espace, se transforme en une pièce orchestrale cinématique. Un arrangement orchestral que l’on doit à Matthieu Vermorel. Un morceau qui prend le temps de respirer sur un solo de guitare et s’ouvre comme un générique de grande production hollywoodienne. 

Tout commence donc par une ouverture symphonique de plus d’une minute entre grandiloquence et douceur, riche de cuivres, de vents comme de cordes. Cette orchestration se poursuit sur le chant de Mathieu.

Les instruments électriques ne s’invitent sur la partition qu’au bout de quatre minutes, lançant le long solo de guitare de plus de cent trente secondes. Le chant reprend de plus belle sur le refrain en une apothéose symphonique et de chœur.

J’aime beaucoup cette version symphonique de ‘shine a light’ même si la toute première reste ma préférée pour des raisons sentimentales.

Je salue anasazi pour s’être lancé dans cette audacieuse aventure, car passer d’une partition de rock alternatif à celle d’un orchestre philharmonique, même avec des banques de sons, c’est un sacré challenge.

Ça pourrait peut-être donner des idées à Mathieu pour les compositions de son prochain EP, qui sait.

Les deux versions sont sur Bandcamp, qui non, ne sponsorise pas Chroniques en Images contrairement à ce que l’on pourrait imaginer.

Je ne peux que vous encourager à écouter ces merveilles, et si vous ne connaissez pas encore anasazi, ben vous savez ce qu’il vous reste à faire d’autant que Mathieu à mis en ligne les premiers effort du groupe dont the principles of hate avec lequel j’ai découvert leur travail en 2006.

Steve Hackett – The Circus and the Nightwhale

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Des fois j’adore Steve Hacket, des fois je le boude un peu. Disons que sa carrière est inégale comme mon humeur. Mon dernier coup de cœur s’intitulait Under A Mediterranean Sky. Les extraits de son nouvel album The Circus And The Nightwhale faisaient pencher mon avis du mauvais côté. Mais comme Inside Out publie son catalogue maintenant sur Bandcamp, je l’ai fait tourner dans le salon avant de l’acheter pour être sûr, et après cette écoute, je l’ai immédiatement commandé en vinyle et numérique pour faire bonne mesure.

Avec treize morceaux pour trois quart d’heure de musique, je le trouve finalement trop court. En fait, non, il possède la durée parfaite pour être écouté sur un tourne disque. Retourner un vinyle passe encore, changer de galette pour écouter la suite de l’album, non.

Steve donne dans le prog symphonique mariné de steampunk, de world music, de blues et d’atmosphères désuètes sur des guitares toujours plus époustouflantes et au final assez peu de chant.

Steve raconte dans The Circus And The Nightwale l’histoire de Travla, allusion probable au voyageur (traveler) plutôt que travelo j’imagine. Un garçon qui naît dans les ruines enfumées de l’après-guerre, qui se découvre une passion pour la guitare, connaît la gloire et en oublie l’essence même de la musique avant de retrouver sa passion intacte, en partie grâce à l’amour. Un récit romancé qui ressemble beaucoup à la vie de l’artiste, de Genesis jusqu’à sa carrière solo.

‘People of the Smoke’ entre bruitages, extraits sonores et cris de nourrisson démarre l’album avec la naissance de Travla, le personnage de notre histoire. Le titre, centré sur la guitare de Steve et les harmonies vocales, avec ses interruptions et son atmosphère steampunk Bouglione est écrit comme une ouverture d’opéra, reprenant les thèmes qui seront développés dans les morceaux suivants.  S’il m’avait déstabilisé à la première écoute, c’est maintenant une de mes pièces préférées de l’album.

Écoute après écoute, ‘Taking You Down’ me semble toujours un peu étrange, peut-être à cause de la voix de de Nad Sylvan. Un titre très rock avec un solo de saxophone et un chant qui tranche beaucoup avec le reste de l’album sans parler de ce son de guitare plein de reverb qui revient sans cesse.

Et est-ce mon oreille qui me joue des tours ? Les premières mesures de ‘Enter The Ring’ me rappellent furieusement les atmosphères du groupe Genesis des seventies où alors est-ce parce que je confonds parfois le personnage au guitariste du groupe de l’époque ?

Je vais encore parler de ‘Circo Inferno’ ou Steve emprunte à la musique orientale pour raconter avec des notes plus qu’avec des mots la spirale infernale dans laquelle Travla se trouve piégé.

Je ne peux pas parler ici de tous les morceaux sinon nous y serions encore demain. Mais je vais encore m’attarder sur un petit dernier :

Steve conclut l’album avec ‘White Dove’, une douceur acoustique mandoline et guitare dont il a le secret et qui n’est pas sans rappeler Bay Of Kings ou son dernier album instrumental Under A Mediterranean Sky.

Je pense que Steve Hackett tient ici son chef d’œuvre, un album qui résume une immense carrière en nous racontant son histoire tout en se réinventant. Il a de très bonnes chances de s’asseoir sur la première marche du podium 2024.

The Ocean – Holocene

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Je comprendrais que nombre de fans de The Ocean considèrent Holocene comme une sorte de trahison.

The Ocean est un groupe de post-metal progressif allemand donnant dans le concept album et le growl. D’ailleurs avec parfois tellement de hurlements, que pendant longtemps, je l’ai snobé. De rebonds en rebonds sur Bandcamp, je suis tombé sur Holocene, le dernier chapitre de leur saga paléontologique dont j’avais survolé quelques morceaux.

Holocene est très différent. D’abord parce que le chant hurlé est en pleine régression sorti des derniers morceaux. Ensuite, parce que les claviers à touches électroniques gagnent beaucoup de terrain dans les compositions.

Du coup, j’ai adoré. Adoré au point de remonter dans le temps et découvrir le cycle paléontologique complet même s’il gratte à peu mes oreilles avec ses hurlements.

Holocene, ce sont huit morceaux pour cinquante-deux minutes et trois pièces relativement longues. Son écriture est nettement plus post-rock alternatif que métal même si à la fin le growl revient en force, comme pour rappeler qui ils étaient.

Je sais que Alias a été un peu déçu par cette conclusion trop lisse, moi j’ai été ébloui (des fois, comme dans un couple, on se dispute un peu, mais c’est ça aussi l’amour).

Un des trucs qui m’a vraiment plus, c’est le chant posé sur les notes électro du premier morceau ‘Preboreal’. Une écriture qui se poursuit sur ‘Boreal’ et qui ressemble beaucoup aux dernières expérimentations d’un collectif que j’adore, à savoir Archive. Et puis il y a ces touches de cuivres assez discrètes comme dans ‘Sea of Reeds’ qui me font songer à un autre groupe de la même mouvance, Crippled Black Phoenix. Une impression renforcée par la voix de Karin Park sur ‘Unconformities’.

Mais The Ocean n’oublie pas de s’énerver aussi un peu à partir de ‘Atlantic’ et même de lâcher quelques gueulantes dans ‘Subboreal’

Tout le monde connaît le crétacé-paléogène.  Mais si ! Vous savez, l’extinction des dinosaures comme dans l’Age de Glace. Oui ! La grosse météorite ou comète qui tombe sur Terre, explose comme plein de bombes nucléaires et qui engendre un long hiver.

Mais connaissez-vous l’Holocène ? Il s’agit de l’extinction massive des espèces de nos jours, une extinction que l’on doit presque exclusivement à l’homme. Nous, nous sommes tellement cons, que tout seuls, on fait plus fort qu’une grosse météorite. Ben, c’est ça l’histoire de cet album. C’est peut-être pour cela qu’il est si différent.

Difficile de vous dire ici à quel point je suis amoureux de cet album à part vous expliquer qu’il contient tout ce que j’aime avec le parfait dosage. Il y a du post-rock, du metal, de l’électro, du prog, du growl, du chant clair et féminin, de l’émotion, des cuivres, du piano, un message.

Bref pour moi c’est une merveille alors allez l’écouter, au moins une fois dans son intégralité sur Bandcamp par exemple.

The Pineapple Thief – It Leads To This

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Bruce Soord

Et si nous faisions une petite pause avec le metal ? Parce que voilà, The Pineapple Thief vient de sortir son nouvel album It Leads To This.

Et si mon enthousiasme varie beaucoup d’un de leur disque à l’autre, j’avoue que cette fois, je suis assez emballé. Si j’aime ce groupe, c’est principalement pour Bruce Soord dont j’adore la carrière solo et pour le batteur de Porcupine Tree, Gavin Harrison.

It Leads To This propose huit titres de rock alternatif dont un ou deux s’approchent du progressif comme le magnifique ‘Now It’s Yours’, le tout en quarante et une minutes.

The Pineapple Thief - It Leads To This

La photographie qui illustre l’album m’a immédiatement séduite. L’image d’une certaine Amérique ruinée qui contraste tellement avec la volonté de se présenter comme une super puissance qui gouverne les autres nations. Un regard posé sur le monde par Bruce Soord afin d’essayer de donner du sens à la vie et ce qui nous entoure.

Les huit morceaux de quatre à cinq minutes possèdent un son rock nettement plus ricain que britannique. Des accents americana de guitares comme dans ‘To Forget’, une batterie en première approche relativement carrée et des claviers souvent en retrait.

L’album alterne habilement douceur et rock plus soutenu. Cela confère un rythme à l’écoute qui souvent a manqué auparavant à The Pineapple Thief.

La voix de Bruce est toujours douce, les claviers assez discrets sauf sur ‘Put It Right’ et ‘The Frost’, la basse est le plus souvent ronde sauf peut-être quelques notes dans ‘Every Trace Of Us’.

La batterie, d’apparence minimaliste, révèle ses finesses lors d’une écoute attentive et la guitare épouse de nombreuses formes, de cristallines à rugueuses, bluesy ou bien steel, des sonorités auxquelles Bruce ne nous avait pas forcément habitué.

Si ‘Put It Right’, qui au passage me fait penser à du Steven Wilson, ressemblerait presque à une balade au piano, ‘Now It’s Yours’ installe une atmosphère angoissante.

Par moments la guitare durcit le ton comme dans ‘Rubicon’ ou encore ‘The Frost’, quelques notes plus nerveuses qui rompent avec la douce mélancolie du chant de Bruce et dynamisent l’album tout en finesse.

Lorsque je vous avais présenté Luminescence, le dernier album solo de Bruce Soord, j’avais affirmé haut et clair que je préférais le travail solo de l’artiste à son groupe, The Pineapple Thief. Avec la sortie de It Leads To This, je suis nettement moins catégorique finalement.

L’album sera le premier à entrer dans la liste des candidats au podium 2024. S’il ne révolutionne pas la face du prog, il possède une telle beauté intérieure qu’il a conquis mon cœur.

Je réserve le 9 mars pour aller les écouter à la Laiterie à Strasbourg en priant pour qu’il n’y ait pas un Alex Henry Foster pour leur voler la vedette.

Caligula’s Horse – Charcoal Grace

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Charcoal est le premier album sorti cette année dont je vais vous parler. Oui encore du métal progressif, je sais, mais c’est le genre de musique que j’aime écouter en ce moment sorti de vieux albums sur lesquels je noie ma nostalgie.

Charcoal dépasse une heure avec deux titres ouvrant et fermant l’album qui explosent le compteur symbolique des dix minutes. Du metal progressif relativement soft au chant clair qui n’est pas sans rappeler le travail de Vola sur leur deux précédents albums.

Après la découverte de la musique du groupe Unprocessed, il faut avouer que Caligula’s Horse manque clairement d’assaisonnement. Il y a bien ‘Golem’ qui démarre sur les chapeaux de roues mais il se dégonfle assez vite. En fait, je crois que j’ai trop écouté de growl depuis le premier janvier et que ici, j’aurai bien aimé entendre quelques hurlements histoire de pimenter la sauce.

Charcoal Grace est un enfant de la pandémie de COVID 19, oui encore un. Un album qui évoque ces mois de confinement et l’espoir de jours meilleurs. Il contient d’ailleurs un tableau en quatre panneaux de plus de vingt minutes, mini concept album dans l’album, qui évoque cette période. D’ailleurs c’est là que se glisse un de mes morceaux préférés, ‘Vigil’, une petite douceur de trois minutes vingt-deux qui tranche avec le reste de l’album.

Mais c’est en regardant le clip du second single de l’album ‘Stormchaser’ que je me suis décidé à l’achat de Charcoal Grace. Le titre alterne plages dynamiques et eaux stagnantes. Vocalement il y a de belles constructions en écho et le refrain fonctionne particulièrement bien sans parler de la guitare tout simplement sublime à la quatrième minute.

J’en oublierai presque de parler de ‘Sails’, une pièce à l’écriture toute simple, pop progressive un peu éclipsée par sa place dans l’album, coincée entre ‘Charcoal Grace’ et ‘Stormchaser’. Il faut également souligner l’ouverture instrumentale magistrale longue de deux minutes quarante de ‘The World Breath With Me’ qui nous immerge dans l’album ou le chant fragile de ‘Mute’, presque comme une complainte folk

Caligula’s Horse joue ici d’un djent très mélodique, un métal prog à claviers, guitares et chant clair assez haut perché, ressemblant beaucoup au Leprous d’avant leur période orchestrale, et qui contrairement à leur précédent album Rise Radiant, prend assez peu de risque.

Le principal reproche que je ferai à cet album, c’est d’être trop long, pourtant il dure à peine plus d’une heure. Mais avec deux titres fleuves qui encadrent sept autres pièces au format moyen relativement homogène, j’ai tendance à décrocher par moment. Du coup j’ai souvent écouté les morceaux indépendamment les un des autres, ce que je fais rarement, pour réussir à m’en imprégner totalement.

Bon ce n’est pas le premier album sorti en 2024 que j’écoute, mais c’est le premier que je chronique par contre. Il n’entrera certainement pas dans mon top 2024 mais il mérite la découverte, d’autant que le label Inside Out a eu la bonne idée de passer son catalogue sur Bandcamp depuis quelque temps.

unprocessed – … and everything in between

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J’avais prévu de vous présenter un des tout premier album 2024 cette semaine mais un concert à la Laiterie à Strasbourg a changé mes plans.

Le jeudi 25 janvier, unprocessed ouvrait pour Tesseract dans la salle strasbourgeoise. Et si je ne connaissais pas encore cette formation allemande, j’ai été ébloui par leur musique et leur performance.

Leur dernier album en date ..and everything in between, écouté quelques heures avant leur concert, est sorti en décembre dernier. Neuf titres courts pour trente neuf minutes de musique.

Alors attention aux oreilles, unprocessed donne dans le djent expérimental, entre Plini et Tesseract, avec du growl, du chant clair et beaucoup de tabassage. Âmes sensibles s’abstenir.

Le groupe se compose de quatre gamins en comparaison des dinosaures du rock progressif qui monte sur scène en déambulateur. Des petits jeunes fougueux et encore bourrés de testostérone. Alors oui, ça dépote.

Ils existent depuis 2014 et ont plusieurs albums à leur actif  dont Covenant qu’Alias avait chroniqué à sa sortie.

Les deux grands atouts de unprocessed sont la guitare et le chant polymorphes. Leur musique passe du gros poutrage à des dentelles d’arpèges, de hurlements caverneux à une voix toute douce.

En plongeant dans …and everything in between, vous accédez à un niveau rythmique infernal où la basse et les guitares en sont la colonne vertébrale comme dans ‘Lore’ ou bien ‘Glass’. Unprocessed rejoint également Plini sur ‘Blackbone’ ou ‘Die on the Cross’ si on fait abstraction du growl, même si je ne suis pas certain que ce soit les mêmes sujets qui les inspirent ici.

Les textes écrits par David John Levy, le bassiste et également growler à ces moments perdus, sont manifestement une plongée dans son enfer personnel, jouant de thèmes religieux, dieu, la crucifixion, l’enfer, le purgatoire, pour raconter ce qui ressemble à une emprise.

La musique elle, est tout sauf easy listening. Elle vous malmène en permanence, fragile, vocodée, violente, hurler. Une musique dans laquelle la guitare peut livrer un djent assourdissant comme des notes cristallines de harpes.

Je ne vais pas tourner autour du pot, unprocessed est une fabuleuse découverte. …and everything in between une tuerie qui aurait pu devenir l’album de l’année 2023 et Covenant, que je découvre en ce moment, est du même tonneau.

Évidemment, il faut être quand même d’humeur joueuse pour écouter leur musique. Il y a des jours où je repose mes tympans. Mais allez les écouter, ils font partie de la génération montante du metal prog. En plus, leurs albums sont sur Bandcamp.

Atoma – Skylight

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En attendant que déboulent les nouveautés 2024, penchons-nous aujourd’hui sur une vieillerie, à savoir un album de 2012. C’est mon ami Stéphane qui l’a acheté sur Bandcamp et comme j’espionne ce qu’il écoute, j’y ai jeté une oreille indiscrète.

Atoma est une formation suédoise née en 2011 sur les cendres du groupe de doom Slumber et qui n’aura composé qu’un seul album, Skylight, un an après sa formation. Un nom né d’une certaine obsession des quatre artistes pour la bombe nucléaire.

Après un long hiatus, le groupe sortait en 2021 un nouveau single intitulé ‘Then Came The Wave’ et un an plus tard, ‘Divina’ ce qui laisse peut-être espérer un prochain second album.

Mais revenons à Skylight. Il s’agit d’un concept album science fictionnesque, un voyage forcé jusqu’au bout de l’univers pour une poignée d’astronautes fuyant la Terre devenue inhospitalière.

Ce récit fantastique n’est que l’histoire bien trop contemporaine des migrants qui fuient leur pays pour trouver refuge ailleurs comme l’a fait Ehsan, le chanteur claviériste du projet, lorsqu’il a émigré en Suède.

Skylight navigue entre post-rock cinématique, électro orientale et métal atmosphérique. Des morceaux majoritairement instrumentaux où se glissent des sections chantées ou criées. Dix pièces de trois à sept minutes pour un voyage d’un peu plus de trois quart d’heure.

En moins de dix minutes, les claviers jouent du Blade Runner sur des percussions tribales, les guitares donnent dans le heavy, la rythmique se fait électro, le chant se mue en growl et les bruitages installent une impression de B.O. de film.

Les guitares de Markus Hill se font floydiennes sur un ‘Bermuda Riviera’, se teintent d’influences orientales quand le chant crié explose sur ‘Skylight’ et que la forme cinématique s’impose sur ‘Saturn & I’ et se poursuit dans ‘Cloud Nine’ avec des chœurs féminins.  Les synthés de Ehsan sont omniprésents sur l’album, dominant les morceaux. Du coup les passages de guitares appuyés sont suffisamment rares ici pour être soulignés comme dans morceau ‘Resonance’.

Skylight est comme une magnifique B.0. qui peut s’écouter en fond sonore. Un album certes pas vraiment récent mais que je vous invite à découvrir sur Bandcamp par exemple.