Au Jardin Botanique de Strasbourg se dresse la coupole d’un observatoire construit en 1840 par nos voisins d’outre Rhin.
Le lieu abrite une lunette de 49 cm de diamètre, un tube métallique de 7 mètres de long porté par une énorme monture.
Avec de gros interrupteurs, des leviers et des molettes, l’opérateur oriente la coupole, déplace le siège où s’assoit l’observateur et guide la lunette. Une vieille machinerie très bruyante qui fait vibrer le plancher de la coupole pendant les manœuvres.
Lorsque le ciel est limpide, quelques privilégiés gravissent les marches conduisant sous le dôme métallique et mettent en route le monstre antique qui ne saurait rivaliser pourtant avec mon petit Celestron Edge HD long de 30 cm.
Pourtant, dès que j’en ai l’occasion, je monte avec d’autres membres de la SAFGA, l’association astronomique strasbourgeoise, observer la Lune, Jupiter ou Saturne avec le vénérable instrument. C’est souvent ainsi que nous terminons nos réunions ou conférences.
S’assoir sur le siège en bois polis par le vénérable postérieur d’astronomes pendant des décennies est un rare privilège. Manoeuvrer le tube et pointer un astre, s’aidant d’une antique lunette guide mal alignée est une sensation grisante et quand l’objet apparaît enfin dans l’énorme oculaire, c’est comme remonter un siècle en arrière.
L’image souffre de défauts chromatiques terribles, la Lune est cerclée de jaune poussin, Jupiter s’invente de nouvelles couleurs, mais malgré cela, on se presse devant les marches menant au siège pour profiter de quelques minutes d’observation.
Au côté de cela, un télescope Seestar de 50 mm, qui tient dans une petite mallette, photographie la nébuleuse de la tête de cheval en quelques minutes en plein centre ville et renvoie l’image directement sur un smartphone. Pas besoin de coupole, de machinerie, d’opérateur ou de connaître son ciel. L’astronomie à la portée de n’importe qui pour moins de 700 €, probablement un gadget qui finira au grenier après quelques semaines d’utilisation, parce que les belles images sont déjà sur Internet.
Je préfère manoeuvrer l’antique lunette dans le froid de la coupole, entendre les moteurs ronronner, poser l’oeil sur l’oculaire et observer une image assez médiocre de la Lune. La faute à mon côté romantique passéiste même si j’adore les nouvelles technologies.