Depuis l’arrivée du télescope dans ma vie d’astronome très amateur, je ne suis monté qu’une fois au Champ du Feu avec le matériel. C’était en plein hiver, à l’époque où je ne maîtrisais pas du tout les rudiments de la mise en station d’un instrument.
Je me suis beaucoup entraîné dans le jardin, en pleine ville, coincé entre quatre clôtures assez hautes et ébloui par le lampadaire des voisins, craignant toujours que l’un d’entre eux me surprenne en pleine action et me dénonce à la police pour voyeurisme.
Vendredi soir, j’ai voulu retenter l’expédition de cet hiver, avec vingt degrés Celsius de plus et un soleil se couchant trois heures plus tard.
Expédition, car le Champ du Feu de situe à trois quart d’heure de voiture de la maison, à plus de mille mètres d’altitude et qu’il faut y transporter tout le matériel : monture, tube, oculaires, télécommande, appareil photo, siège, pied, bouteille d’eau, boussole, niveau à bulles, smartphone, objectifs… Un véritable déménagement.
Mon fils n’a pas voulu m’accompagner et ma femme n’a pas eu non plus ce courage.
Je suis arrivé là haut pour le coucher du soleil. Et miracle, cette fois, je n’étais pas tout seul comme lors de ma précédente expédition. Trois campings car étaient stationnés pour la nuit sur le parking et il restait quelques promeneurs sur le sommet.
J’ai commencé par mettre en station la monture équatoriale allemande, orientation au nord, mise à niveau, équilibrage puis j’ai installé dessus le boîtier photo équipé d’un 500 mm. C’est avec cet attirail que j’ai capturé les derniers instants du soleil se couchant sur les Vosges. La température a vite baissé et j’ai regretté de ne pas avoir mis des chaussettes et une doudoune chaude, car passé minuit j’avais froid.
C’est à peu près à ce moment qu’est arrivé le tout premier d’entre eux. Une voiture blanche s’est approchée doucement de mon installation, la vitre côté conducteur s’est baissée et une personne avenante m’a salué : « Bonsoir, vous faites de l’astro photo ? Moi aussi. Je m’installe un peu plus bas mais je viendrai vous voir après. ». C’était Arnaud, un photographe, astronome amateur, chasseur d’orage de Sélestat.
Puis une autre voiture est arrivée, puis une autre et encore une autre jusqu’à que cinq groupes d’astronomes du vendredi soir soient installés sur le parking. Cette fois, entre deux photos, c’est moi qui suis allé les saluer. Il y avait de tout, du Dobson, du Newton, du Schmitt Cassegrain, un club, des solitaires et des curieux.
Très vite nous avons échangé sur le matériel, les problèmes techniques, les photos avant d’achever, chacun dans notre coin, la mise en station du matériel : alignement polaire, calibration du GoTo, équilibrage fin de l’équipement.
La séance d’observation a pu commencer. Après Venus, j’ai pointé l’amas globulaire M 92 pour tester la configuration. Mon voisin, n’ayant jamais pointé l’objet, est venu observer l’amas et s’est empressé de retourner le pointer sur son Newton. Cependant, son objectif ce soir là, était la galaxie M 101 avec la supernovae qui brille sur un de ses bras spiralés.
Je me suis dit que je pourrais copier et j’ai pointé l’objet. Sublime !
Comme mon installation semblait bien réglée pour une fois, j’ai quand même fait deux calibrations et deux alignements polaires, j’ai poussé certaines photos jusque quatre-vingt secondes de pose. Un record sans trop de trainée. J’ai également lancé plusieurs séries d’une vingtaine d’images qui m’ont permis d’aller espionner mes voisins pendant que le boîtier faisait son travail.
Voici mon tableau de chasse de la soirée : M 92, M 101, M 82 et M 27, quatre magnifiques objets du catalogue Messier, deux galaxies, une nébuleuse et un amas globulaire. Des petites séries de photos que je vais essayer d’empiler dans le logiciel Siril pour voir ce que cela donne.
Outre de relativement bons résultats photographiques en comparaison des précédentes sessions, j’ai fait de belles rencontres dans la communauté des astronomes amateurs de la région. Une expérience qui va certainement me motiver à manquer des heures de sommeil pourtant précieuses et que je ne vais pas rattraper au travail ni pendant les concerts à venir.